L'odyssée d'Hakim, de F. TOULME

Résumé :

L'histoire vraie d'un homme qui a dû tout quitter : sa famille, ses amis, sa propre entreprise... parce que la guerre éclatait, parce qu'on l'avait torturé, parce que le pays voisin semblait pouvoir lui offrir un avenir et la sécurité. Un récit du réel, entre espoir et violence, qui raconte comment la guerre vous force à abandonner votre terre, ceux que vous aimez et fait de vous un réfugié.

L'avis de LaPACH :

Raconter c’est exister, car lorsque l’on se retrouve déraciné, exilé par l’obligation de fuir son propre pays, c’est tout un passé qui est balayé et tout un avenir qui est compromis.

Le décor est vite posé à coup d’interrogations légitimes de l’auteur. Certains drames ont une visibilité bien plus forte que d’autres… pourquoi un crash d’avion et ses 150 victimes reçoit-il un écho retentissant dans les médias, alors que la noyade de 400 migrants le même jour ne fait l’objet que d’un rapport laconique et froid dans ces mêmes médias ? D’un côté, une empathie publique très marquée, de l’autre, une relative indifférence.
L’auteur en conclut que, probablement, nous parvenons mieux à nous identifier à ces voyageurs des airs au destin tragique qu’à ces voyageurs contraints à l’exil pour sauver leur vie et celle de leur famille. 
Alors, quoi de mieux pour comprendre ces drames de l’exil et des réfugiés, que d’aller rencontrer un homme ayant traversé cette épreuve du déracinement afin de comprendre son parcours, ce qui a motivé ses choix et qui a construit sa vie d’aujourd’hui.
Avec beaucoup de délicatesse et de patience, l’auteur fait parler Hakim de sa vie d’avant, celle d’un « monsieur-tout-le-monde » en Syrie, qui avait sa société, ses projets d’avenir, sa famille si précieuse et aimante et qui dans son récit, insiste bien sur l’amour qu’il avait de son pays et le souhait d’y vivre une vie paisible. Lui qui n’enfreint aucune règle, qui n’est pas particulièrement impliqué dans le processus de révolte civile qui émerge, il voit progressivement s’installer la répression autoritaire de Bachar El Assad. 
Avec beaucoup de pudeur et la volonté de transmettre son histoire, Hakim se confie à l’auteur et présente la vision juste et réaliste d’un homme ordinaire auquel on finit par s’identifier. Ce témoignage permet également à Fabien TOULMÉ de retracer avec simplicité et clarté le conflit syrien des 10 dernières années et de rendre ce sujet totalement abordable à tout public. 

Visuellement, c’est sobre, efficace et expressif. Les couleurs pastel claires, entre le bleu et l’ocre rappellent les teintes de ce pays en souffrance et apportent un peu de douceur à ce terrible récit.

Cet album est une grande réussite qui permet de réfléchir sur cette question du déracinement contraint et de réaliser combien nous sommes privilégiés de vivre dans un pays de droits et de liberté. Une lecture qui permet de relativiser nos petits maux à travers les mots… et les bulles !